26/09/2018
du pliaj
Konsilanto
Estu mia konsilanto,
ĉar via konsilo estas
tiu nutraĵo de l'vivo,
kiun la menso necesas.
De antaŭlonge mi tre solas
for de vagantaj estaĵoj,
ĉar mia korpo deĵoras
en mallibereja spaco.
Estu mia konsilanto,
nevidebla mondkreinto,
dum mi kalkulas la tagojn
meze de ĉi labirinto.
La tempo rapide pasis
kaj mi vidas la ĉielon,
sed mi necesas konsilon
antaŭ ol tuŝi la celon.
Arquillos junio 2017
kaj
de patro al sia filineto mortinta antaŭ longe
Ŝajnas ke ŝi min rigardas
kun tre mistera mieno,
ofertante per la vido
lokon ĉe l'vasta ĉielo
Sed la ĉielo distancas,
ĉar mi loĝas en la tero
kie regas la malĝojo
kaj eterniĝas la tempo.
Ŝajnas ke ŝi min konsolas
per ĉielaj karesoj
dum sekigas miajn larmojn
la brizo de milda vento.
Mi feliĉas dum la dormo
kaj ripozo de la menso,
kun flugiloj fantaziaj
traflugante l'universon.
Ŝajnas ke ŝi min rigardas,
kaj atendas kun sereno
nian renkonton ĉielan,
tiel estas mia sento.
Arquillos junio 2017
18/07/2018
la France de maintenant
La Dernière âme
Le ciel était sans dieux, la terre sans autels.
Nul réveil ne suivait les existences brèves.
L’homme ne connaissait, déchu des anciens rêves.
Que la Peur et l’Ennui qui fussent immortels.
Le seul chacal hantait le sépulcre de pierre.
Où, mains jointes, dormit longtemps l’aïeul sculpté ;
Et, le marbre des bras s’étant émietté,
Le tombeau même avait désappris la prière.
Qui donc se souvenait qu’une âme eût dit : Je crois !
L’antique oubli couvrait les divines légendes.
Dans les marchés publics on suspendait les viandes
A des poteaux sanglants faits en forme de croix.
Le vieux soleil errant dans l’espace incolore
Était las d’éclairer d’insipides destins…
Un homme qui venait de pays très lointains,
Me dit : « Dans ma patrie il est un temple encore.
« Antique survivant des siècles révolus,
« Il s’écroule parmi le roc, le lierre et l’herbe,
« Et garde, encor sacré dans sa chute superbe,
« Le souvenir d’un Dieu de qui le nom n’est plus. »
Alors j’abandonnai les villes sans église
Et les cœurs sans élan d’espérance ou d’amour
En qui le doute même était mort sans retour
Et que tranquillisait la certitude acquise.
Les jours après les jours s’écoulèrent. J’allais.
Près de fleuves taris dormaient des cités mortes ;
Le vent seul visitait, engouffré sous les portes,
La Solitude assise au fond des vieux palais.
Ma jeunesse, au départ, marchait d’un pied robuste.
Mais j’achevai la route avec des pas tremblants ;
Ma tempe desséchée avait des cheveux blancs
Quand j’atteignis le seuil de la ruine auguste.
Déchiré, haletant, accablé, radieux,
Je dressai vers l’autel mon front que l’âge écrase,
Et mon âme exhalée en un grand cri d’extase
Monta, dernier encens, vers le dernier des dieux !
Catulle-Mendès
09/07/2018
rien que pour n'avoir écrit que ça il mériterait le pinacle et de n'être jamais oublié !
« Seigneur, je vous sais gré, rêveur et fainéant.
De m'avoir mis au monde et tiré du néant !
Ceux qui ne sont pas nés n'ont pas vu les étoiles, »
(Alphonse ESQUIROS, 1841)
06/07/2018
du tre trafaj poemoj- kiujn mi povus diri
kiuj metas onin en marojn da meditadoj
« Soleco havas dornojn [tio facile kompreniĝas, mi pensas]
Mi tre amas la solecon
ĉar ĝi similas al rozoj. »
(Angel arquillos)
ne nur pro la dornoj, soleco estas stato kie eblas flari parfumojn de aĵoj ne flareblaj alimaniere,.
Do ankaŭ mi povas diri tiun poemon
ankaŭ :
« Sub olivarb'
amoras mi
kun mia am' »
(Angel arquillos)
videble ĝi ne aludas al vera amorado (kvankam tio estas bona kaj laŭdinda ! Mi tre ŝatas kaj alte metas lian poemon « Bela momento ») sed estas ludo kun la am' , ia Valery-a eble, la am' kiun povas naski la vido de folioj de olivarbo, aŭ simila loko. Speco da pleneco kaj transcendo de amo.
(Estu afablaj, bv. lernu vi ilin parkere ! poemoj estas faritaj por ilin lerni parkere, tiuj, kiuj ne indas esti lernitaj parkere, ankaŭ ne indas esti legitaj !)
30/06/2018
une citation "incontournable" de CAMUS dans "le Malentendu"
« Voici maintenant ma vieille angoisse, là, au creux de mon corps, comme une mauvaise blessure que chaque mouvement irrite. Je connais son nom. Elle est peur de la solitude éternelle, crainte qu’il n’y ait pas de réponse. »
malheureux ceux que cette citation ne visite pas au moins uns fois par jour...
23/06/2018
le temps de la vraie vie - profondeur du monde
Couplet du Trottoir D'été
Couchons-nous sur le pavé,
Par le soleil chauffé, par le soleil lavé,
Dans la bonne odeur de poussière
De la journée achevée,
Avant la nuit levée,
Avant la première lumière
Et nous guetterons dans le ruisseau
Les reflets des nuages en assaut.
Le coup de sang de l'horizon
Et la première étoile au-dessus des maisons.
par Robert Desnos
20/06/2018
voix fraternelles, pauvres voix humaines ...
Ce texte de René Grousset, humble note en bas de page, qui vient d'un livre ("Bilan de l'Histoire") qu'il a écrit, peut-être son dernier, en 1946; je n'existais pas encore alors, pas même à l'état de foetus; livre que j'ai moi-même acheté en 1978, du temps où je logeais dans une chambre d'hotel, et où tout mon équipement tenait dans une valise.
Ce texte, je ne l'ai jamais oublié, et je voudrais le faire inscrire sur ma tombe.
le voici:
Rappelons seulement l'émouvant ex-voto relevé par Chavannes sur une des stèles T'ang:
«Moi, serviteur du Bouddha, me voici abandonné seul, ayant perdu tous les miens. Devant un arbre agité par le vent, longuement je pense à eux et je questionne le ciel sans obtenir de réponse. Je voudrais me confier aŭ génies pour qu'ils m'arrachent de ce chemin solitaire. Alors je donne mes biens pour faire avec respect ces images du Bouddha. J'espère que par elles la paix se répandra sur les vivants et sur les morts. »
Est-il rien de plus près de nous que ces humbles voix qui, par-delà les siècles et les tombes, nous confient ainsi leur angoisse et leur invincible espérance? Voix en prière des profondeurs du passé, voix fraternelles, pauvres voix humaines...
11/06/2018
la femme des sables de Kobo Abé
les aides-soignantes et personnel de service du « home pour personnes agées » (mouroir) de Saméon, et les pensionnaires qui y étaient, vivent tout à fait comme les personnages de « La femme des sables » de Kobo Abé.
15/05/2018
un des plus beaux poèmes de la langue anglaise !
Rudyard Kipling :
I have done mostly what most men do,
And pushed it out of my mind;
But I can't forget, if I wanted to,
Four-Feet trotting behind.
Day after day, the whole day through --
Wherever my road inclined --
Four-feet said, "I am coming with you!"
And trotted along behind.
Now I must go by some other round, --
Which I shall never find --
Somewhere that does not carry the sound
Of Four-Feet trotting behind.
30/03/2018
la morale de Don Quichotte
Tout le monde connait Don Quichotte, mais qui a lu le livre ? je veux dire, en entier ?
En Espagne presque tout le monde a le livre chez soi, mais presque personne ne l'a lu, sauf sous forme de morceaux choisis pour les enfants ! Et en France pareil ! à part l'histoire des moulins à vents qui connaît ce qu'il y a dans les 800 pages (800 pages ça fait, Don Quichotte !) du livre? hein?!
Moi j'ai eu la chance de recevoir (gratis en plus !) le texte complet traduit en Espéranto par Fernando De Diego. (et je l'ai lu ! toutes les 800 pages)
Mais je me contenterai ici de citer le passage peut-être le plus important du livre: c'est quand Don Quichotte libère toute une troupe de brigands, qu'il rencontre enchaînés et conduits aux galères. Bien sûr tout le monde le critique et se moque de lui, ce sont des criminels et non d'innocentes victimes qu'il a libéré là. Mais Don Quichotte répond alors par ces mots, d'une telle noblesse, qu'on ne peut s'empêcher de penser que secrètement l'auteur admire son héros:
"Cela ne concerne pas les chevaliers errants et ne fait pas partie de leur devoirs de déterminer si les hommes affligés, prisonniers et enchaînés qu'ils rencontrent sur leur chemin, se trouvent en tel état à cause de leurs crimes ou bien par l'adversité du sort; leur seule tâche consiste en ceci: les aider, considérant non pas leurs méfaits, mais bien leur souffrance. J'ai rencontré un véritable rosaire d'hommes mornes et misérables et me suis conduit envers eux, comme ma religion me le prescrit. Le reste n'a aucune importance. "
N'est-il pas en fait un héros moral ? à la manière d'Antigone, avec l'autonomie personnelle et le courage de mettre ses principes en pratique que met en relief Michel Terestchenko dans son livre "Un si fragile vernis d'humanité", et aussi selon les principes de Zygmunt Bauman, qui a montré que mettre la source de la morale dans la société, et l'"éducation" qu'elle dispense, est une erreur (une erreur qui qui peut être tout à fait dramatique et criminelle, voyez l'Allemagne de 1933-45...) et que la vraie source se trouve, "quoi qu'on die", dans la conscience interne individuelle. C'est ce qu'avait découvert aussi Curzio Malaparte dans ses relations avec son chien Febo.