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04/11/2015

les années 70

23/10/2015

à quoi bon l'existence ?

Jules Laforgue

Le Sanglot de la Terre (et autres premiers poèmes)



Je ne puis m’endormir ; je songe, au bercement
De l’averse emplissant la nuit et le silence.
On dort, on aime, on joue. Oh ! par la Terre immense,
Est-il quelqu’un qui songe à moi, dans ce moment ?

Le Témoin éternel qui trône au firmament,
Me voit-il ? me sait-il ? Qui dira ce qu’il pense?
Tout est trop triste et sale. — À quoi bon l’Existence ?
Si ce Globe endormi gelait subitement ?

Si rien ne s’éveillait demain ! Oh ! quel grand rêve !
Plus qu’un stupide bloc sans mémoire et sans sève
Qui sent confusément le Soleil et le suit.

Les siècles passent. Nul n’est là. Pas d’autre bruit
Que le vent éternel et l’eau battant les grèves....
Rien qu’un Cercueil perdu qui flotte dans la Nuit.

 

"Du vieux papier on fait du neuf, et des morts se font les vivants, et toujours ainsi, jusqu’à la fin des siècles ! Or, si tout cela n’est que cela, néant pour néant, ne valait-il pas mieux le néant calme ?" (Henri Cazalis)

14/10/2015

Ce temps est si sévère

En 1855 Théodore de Banville (un homme beaucoup plus sensible que le prétendent les manuels de littérature) semblait avoir déjà prévu quelle serait  l'ambiance de notre sinistre époque !

Ce temps est si sévère
           Qu’on n’ose pas
      Remplir deux fois son verre
           Dans un repas,

      Ni céder à l’ivresse
           De son désir,
      Ni chanter sa maîtresse
           Et le plaisir !

      On croit que, pour paraître
           Rempli d’orgueil,
      Il est distingué d’être
           Toujours en deuil !

      Les topazes, la soie,
           La pourpre et tout,
      Ne font pas une joie
           D’assez bon goût,   

Et les bourgeois que flatte
           Un speech verbeux,
      Ont peur de l’écarlate
           Comme les bœufs !

      O pauvres gens sans flamme,
           Qui, par devoir,
      Mettent, même à leur âme,
           Un habit noir !

      Qu’ils ne puissent plus boire
           Sans déroger,
      C’est bien fait pour leur gloire !
           Mais, cher Roger,

      Nous de qui le cœur aime
           Un doux regard,
      Admirons ce carême
           Comme objet d’art,

      Et restons à notre aise
           Dans le soleil
      Qu’a fait Paul Véronèse
           Aux Dieux pareil !

      Sa lèvre nous embrase !
           Que ces marchands
      Gardent pour eux l’emphase,
           Et nous les chants ! 

Tant que des gens moroses
           Le ciel épris
      Ne mettra pas aux roses
           Un habit gris,

      Tant qu’au dôme où scintillent
           Les firmaments,
      Parmi les saphirs brillent
           Des diamants,

      Tant qu’au bois, où m’accueille
           Un vert sentier,
      Naîtront le chèvrefeuille
           Et l’églantier,

      Tant que sous les dentelles
           Daignent encor
      Nous sourire les belles
           Aux cheveux d’or,

      Tant que le vin de France
           Et les raisins
      Porteront l’espérance
           A nos voisins,

      Gardons la jeune Grâce
           Pour échanson,
      Que jamais rien ne lasse
           Notre chanson      

Et vous que j’accompagne
           Jusqu’au mourir,
      Versez-nous le champagne !
           Laissons courir,

      Avec l’or et la lie
           De sa liqueur,
      L’inconstante folie
           Dans notre cœur.

      Buvons ce flot suave
           Et sans rival,
      Et nous prendrons l’air grave
           Au carnaval !


 (confirmation de l'évolution de notre sinistre époque : les études ont montré que les gens de nos jours rien dte 10 à 20 fois moins souvent qu'en 1930 https://sharknews.fr/2012/09/19/internet-le-refuge-du-rire/3705/

03/10/2015

Des cadavres de jours rongés par les étoiles

un vers génial de Guillaume Apollinaire :

Gonfle-toi vers la nuit Ô Mer Les yeux des squales
Jusqu'à l'aube ont guetté de loin avidement
Des cadavres de jours rongés par les étoiles
Parmi le bruit des flots et les derniers serments

 

"Des cadavres de jours rongés par les étoiles"

c'est tout à fait ça ! voilà ce que devient notre vie.

25/09/2015

un des plus grand poètes du XIXè siècle: Louise Ackermann

Les vents vont disperser cette noble poussière Qui fut jadis un coeur

 

L'amour et la mort

I

Regardez-les passer, ces couples éphémères !
Dans les bras l’un de l’autre enlacés un moment,
Tous, avant de mêler à jamais leurs poussières,
Font le même serment :

Toujours ! Un mot hardi que les cieux qui vieillissent
Avec étonnement entendent prononcer,
Et qu’osent répéter des lèvres qui pâlissent
Et qui vont se glacer.

Vous qui vivez si peu, pourquoi cette promesse
Qu’un élan d’espérance arrache à votre coeur,
Vain défi qu’au néant vous jetez, dans l’ivresse
D’un instant de bonheur ?

Amants, autour de vous une voix inflexible
Crie à tout ce qui naît : “Aime et meurs ici-bas ! ”
La mort est implacable et le ciel insensible ;
Vous n’échapperez pas.

Eh bien ! puisqu’il le faut, sans trouble et sans murmure,
Forts de ce même amour dont vous vous enivrez
Et perdus dans le sein de l’immense Nature,
Aimez donc, et mourez !

II

Non, non, tout n’est pas dit, vers la beauté fragile
Quand un charme invincible emporte le désir,
Sous le feu d’un baiser quand notre pauvre argile
A frémi de plaisir.

Notre serment sacré part d’une âme immortelle ;
C’est elle qui s’émeut quand frissonne le corps ;
Nous entendons sa voix et le bruit de son aile
Jusque dans nos transports.

Nous le répétons donc, ce mot qui fait d’envie
Pâlir au firmament les astres radieux,
Ce mot qui joint les coeurs et devient, dès la vie,
Leur lien pour les cieux.

Dans le ravissement d’une éternelle étreinte
Ils passent entraînés, ces couples amoureux,
Et ne s’arrêtent pas pour jeter avec crainte
Un regard autour d’eux.

Ils demeurent sereins quand tout s’écroule et tombe ;
Leur espoir est leur joie et leur appui divin ;
Ils ne trébuchent point lorsque contre une tombe
Leur pied heurte en chemin.

Toi-même, quand tes bois abritent leur délire,
Quand tu couvres de fleurs et d’ombre leurs sentiers,
Nature, toi leur mère, aurais-tu ce sourire
S’ils mouraient tout entiers ?

Sous le voile léger de la beauté mortelle
Trouver l’âme qu’on cherche et qui pour nous éclôt,
Le temps de l’entrevoir, de s’écrier : ” C’est Elle ! ”
Et la perdre aussitôt,

Et la perdre à jamais ! Cette seule pensée
Change en spectre à nos yeux l’image de l’amour.
Quoi ! ces voeux infinis, cette ardeur insensée
Pour un être d’un jour !

Et toi, serais-tu donc à ce point sans entrailles,
Grand Dieu qui dois d’en haut tout entendre et tout voir,
Que tant d’adieux navrants et tant de funérailles
Ne puissent t’émouvoir,

Qu’à cette tombe obscure où tu nous fais descendre
Tu dises : ” Garde-les, leurs cris sont superflus.
Amèrement en vain l’on pleure sur leur cendre ;
Tu ne les rendras plus ! ”

Mais non ! Dieu qu’on dit bon, tu permets qu’on espère ;
Unir pour séparer, ce n’est point ton dessein.
Tout ce qui s’est aimé, fût-ce un jour, sur la terre,
Va s’aimer dans ton sein.

III

Eternité de l’homme, illusion ! chimère !
Mensonge de l’amour et de l’orgueil humain !
Il n’a point eu d’hier, ce fantôme éphémère,
Il lui faut un demain !

Pour cet éclair de vie et pour cette étincelle
Qui brûle une minute en vos coeurs étonnés,
Vous oubliez soudain la fange maternelle
Et vos destins bornés.

Vous échapperiez donc, ô rêveurs téméraires
Seuls au Pouvoir fatal qui détruit en créant ?
Quittez un tel espoir ; tous les limons sont frères
En face du néant.

Vous dites à la Nuit qui passe dans ses voiles :
” J’aime, et j’espère voir expirer tes flambeaux. ”
La Nuit ne répond rien, mais demain ses étoiles
Luiront sur vos tombeaux.

Vous croyez que l’amour dont l’âpre feu vous presse
A réservé pour vous sa flamme et ses rayons ;
La fleur que vous brisez soupire avec ivresse :
“Nous aussi nous aimons !”

Heureux, vous aspirez la grande âme invisible
Qui remplit tout, les bois, les champs de ses ardeurs ;
La Nature sourit, mais elle est insensible :
Que lui font vos bonheurs ?

Elle n’a qu’un désir, la marâtre immortelle,
C’est d’enfanter toujours, sans fin, sans trêve, encor.
Mère avide, elle a pris l’éternité pour elle,
Et vous laisse la mort.

Toute sa prévoyance est pour ce qui va naître ;
Le reste est confondu dans un suprême oubli.
Vous, vous avez aimé, vous pouvez disparaître :
Son voeu s’est accompli.

Quand un souffle d’amour traverse vos poitrines,
Sur des flots de bonheur vous tenant suspendus,
Aux pieds de la Beauté lorsque des mains divines
Vous jettent éperdus ;

Quand, pressant sur ce coeur qui va bientôt s’éteindre
Un autre objet souffrant, forme vaine ici-bas,
Il vous semble, mortels, que vous allez étreindre
L’Infini dans vos bras ;

Ces délires sacrés, ces désirs sans mesure
Déchaînés dans vos flancs comme d’ardents essaims,
Ces transports, c’est déjà l’Humanité future
Qui s’agite en vos seins.

Elle se dissoudra, cette argile légère
Qu’ont émue un instant la joie et la douleur ;
Les vents vont disperser cette noble poussière
Qui fut jadis un coeur.

Mais d’autres coeurs naîtront qui renoueront la trame
De vos espoirs brisés, de vos amours éteints,
Perpétuant vos pleurs, vos rêves, votre flamme,
Dans les âges lointains.

Tous les êtres, formant une chaîne éternelle,
Se passent, en courant, le flambeau de l’amour.
Chacun rapidement prend la torche immortelle
Et la rend à son tour.

Aveuglés par l’éclat de sa lumière errante,
Vous jurez, dans la nuit où le sort vous plongea,
De la tenir toujours : à votre main mourante
Elle échappe déjà.

Du moins vous aurez vu luire un éclair sublime ;
Il aura sillonné votre vie un moment ;
En tombant vous pourrez emporter dans l’abîme
Votre éblouissement.

Et quand il régnerait au fond du ciel paisible
Un être sans pitié qui contemplât souffrir,
Si son oeil éternel considère, impassible,
Le naître et le mourir,

Sur le bord de la tombe, et sous ce regard même,
Qu’un mouvement d’amour soit encor votre adieu !
Oui, faites voir combien l’homme est grand lorsqu’il aime,
Et pardonnez à Dieu !

 

 

     Louise Ackermann  Poésies Philosophiques

 

 


"La Nuit ne répond rien, mais demain ses étoiles
Luiront sur vos tombeaux."

05/09/2015

reveno

La reveno

 

La ŝtonoj kuŝas sur siaj lokoj

nur pli rondaj

nur pli glataj

de la multaj pluvoj

la arboj kreskas sur la samaj lokoj

eble pli grandaj

ilia ombro pli vasta

pli da birdoj en iliaj branĉoj

la domoj la homoj la bestoj

ĉio estas kiel antaŭe

La homoj kun siaj voçoj

agrable afablaj

la domo kiu iam estis hejmo

la ŝtonoj kiuj iam sukcesis

transdoni sian varmon

al la nudaj piedoj

la arboj kies branĉoj

kutimis luli min

kiam mi tion postulis de ili

ne estas kiel antaŭe
Miaj pensoj estas for de ili

mia sopiro alie

fremde rigardas ilin miaj okuloj

la piedoj ne plu nudaj

ne povas senti la varmon de la ŝtonoj

nek la ŝtonoj povas rekoni mian paŝon




Franko Luin

21/08/2015

sun' kaj luno en sama ĉielo

La Suno kaj la Luno

 

La Sun' sin banas

kun trankvil'

ĉe l'fora horizont'

dum la koketa Lun'

ŝminkas sin

kun arto kaj graci'.

Alvenas la vesper'

plenplena je mallum'

kaj la misteraj ombroj

ĉirkaŭas al la Lun'.

Mi miras la belecon

de tiu renkontiĝo

kaj ĝuas en silento...

 

Arquillos 11-1-15

11/08/2015

très très beau poème

 
Ultima
 
Il pleut. Je rêve. Et je crois voir, entre les arbres
De la place vide qui luit,
Un buste en pierre et le socle de marbre.
Mon frère passe et dit : C’est lui.

Mon frère, vous aurez aimé les ports, les îles
Surtout le ciel, surtout la mer;
Moi les livres, les vers parfaits, les jours tranquilles.
Et nous aurons beaucoup souffert.
 
     
 
Emile Despax. (1881-1915), La Maison des Glycines. (1905)

30/06/2015

ĉio bluas

Ĉio bluas

 

Vidu kiel bluas la ĉielo.

Nuboj blankaj ne plu estas

kaj la reĝa suno brilas

kaj la tempesto forestas.

Vidu, kara, kiel belas

la horizonta linio

kaj la senfina mistero

de la nevidebla dio.

Vidu la boaton liliputan

alvenanta, ĝojoplena

kun ĥimeraj pasaĝeroj

sur la blua mar' serena.

Viaj okuloj bluas

kiel la bluo ĉiela

kiel ĉi blua rakonto

kaj la dio nevidebla.

 

Arquillos 7-1-13

25/06/2015

citations de Stig dagerman

 

« Où qu’on aille on porte la mort avec soi. C’est pour ça qu’on a si peur de soi-même. Mais à la fin ce sont les autres qui vous portent et il n’y a qu’à se dire tant mieux et merci. »

 

« Pourquoi faut-il toujours quitter les lieux que nous aimons et pourquoi faut-il que ceux que nous aimons nous quittent et nous laissent seuls ? »

Dagerman (Stig)

« Notre besoin de consolation est impossible à rassasier. »

Dagerman (Stig)