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14/05/2023

l'époque - maintenant disparue - où les gens ont su sentir aimer et décrire les choses

La deuxième moitié du XIXème siècle, début du XXème, est L’époque où on a pu parler, sentir, en fait, éprouver, chanter la nature, la campagne, et les campagnards, et, je suis persuadé que ça part du même processus, que c’est lié, l’époque des sentiments fins, inexprimables, du rêve, de la nuance (Jankélévitch). Et en musique, et en peinture, il ne faut oublier c’est l’époque de l’impressionnisme, aussi surtout des peintres paysagers réalistes et sensibles, et aussi l’époque de Vuillard. Et bien sûr d’abord en littérature, c’est là surtout que c’est le plus frappant et que ça été le plus développé et le plus irremplaçable. (et oublié je trouve) C’est l’époque de Verhaeren aussi. En effet avant, les sociétés, au niveau des milieux qui produisaient la culture classique, essentiellement aristocratiques, méprisaient la nature - regardez les réactions de Voltaire à Ferney, comment il décrit des types de paysages qui seront ressentis tout différemment par les romantiques et encore différemment par la génération dont je parle, celle de Déodat de Séverac etc. - étaient même totalement incapables d’en percevoir la beauté (ou alors à travers tout un monde de conventions). Quant à l’époque qui a suivi, ha ! bien, d’abord la nature, et la campagne ont disparus ! et la perception de la nature a à peu près disparue elle aussi, ce qui l’a remplacé, c’est une perception intellectuelle : l’écologie ! mais là ça n’a rien à voir avec la sensibilité « Fauré-Debussy », Francis Jammes, du XIXème siècle c’est en fait une Nature conceptualisée - on joue avec des concepts comme avec de jeux de cubes ! - ça n’a rien à voir, ce n’est pas la vie, sensuelle, concrète, existentielle, amoureuse, des auteurs de souvenirs régionalistes, des sensibilités à fleurs de peau type Colette ou Anna de Noailles, des symbolistes, des peintres paysagers (école d’Arras, etc.) de toute la musique et la poétique de la « magie » et de la « nuance » (Jankélévitch) .
Maintenant on n’aime plus la nature, on aime le rock and roll, le monde « urbain » c. à d. buildings artificiels, banlieues à l’américaine, plastiques, etc., et d’ailleurs les lieux où la découverte de la nature serait possible n’existent plus ou les gens n’y VIVENT plus, n’y passent plus leur enfance, ce n’est au plus que des lieux d’excursion touristisés, c’est à dire GADGETISÉS etc.,.

Il y a eu donc entre les deux une « fenêtre », où la rencontre ouverte, sensible, riche, émotionnelle, et aussi concrète, avec toutes les ressources perceptives, avec la nature, dans l’art a été possible. Et ce fut celle là.

 

C’est aussi l’époque socialement, la seule, où la vie des gens de la campagne et du peuple (exception faite du peuple de la génération suivante : les ouvriers, les « outcasts » du capitalisme industriel ou « libéral-fasciste » actuel, qui se retrouve plus tard dans l’époque suivante) a pu être dépeinte dans la littérature : Forcément : avant, ceux qui écrivaient appartenaient presque exclusivement à l’aristocratie, et éprouvaient un racisme social et une profonde indifférence pour la vie des gens d’en dessous. (sur les gitans d'Espagne et le flamenco on n'a commencé à en parler qu'avec la fin du XIXè siècle. Pareil en France avec le Compagnonnage !) A l’époque d’après là-aussi ils ont disparus ! plus de paysans, plus d’artisans, et tous les milieux de cette génération, les charbonniers par exemple, fini ! Par contre là le temps d’un passage, il s’est trouvé des bourgeois non seulement suffisamment proches de la vie réelle, et surtout pourvus d’une forte, et là aussi dionysiaque, empathie pour les gens du peuple, et qui l’ont dépeint sous toutes ses coutures, et surtout c’est l’époque où il s’est trouvé des gens nés dans le peuple qui ayant eu une enfance pauvre, paysanne, errante (Gorki), ouvrière (Marguerite Audoux) etc. qui ont pu arriver à une vie d’écrivain et rapporter leurs souvenirs. Maintenant qu’ils sont morts ce ne sera plus possible : la société qu’ils on vécus est morte, c’est fini.

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